jeudi 16 septembre 2010

Image inattendue d’une mort douce

Vous avez une fille de 8 ans. Demain, c’est la rentrée des classes. Il est 22h. Vous accompagnez votre fille dans sa chambre car il est l’heure pour elle de se coucher. Vous constatez sans trop y prêter attention d’abord qu’elle se gratte la tête. Qu’elle se gratte la tête avec insistance. Trois secondes de blanc dans votre cerveau et le mot « poux » apparaît dans votre esprit. Vous vous précipitez pour écarter les cheveux de l’enfant à la racine en plusieurs endroits et bien sûr, son crâne grouille de bestioles. Il est 22h15, un dimanche, en Province, votre fille a des poux et c’est demain la rentrée des classes : vous êtes carbonisée.

Que fait la femme moderne dans une telle situation ? Ne pouvant simplement aller à la pharmacie acheter du produit anti-poux puisqu’il est 22h30 un dimanche en province, sa réaction comprend deux étapes.

La première étape : se tourner vers le savoir traditionnel de ses ancêtres. Que disait mémé à propos des poux ? Qu’il faut verser du vinaigre sur la tête de l’enfant et frotter, la théorie étant que l’acidité du vinaigre va tuer les poux. On l’a déjà essayé sur vous quand vous étiez petite, vous l’avez vu essayer sur les enfants des autres, vous n’êtes pas votre grand-mère, vous êtes une femme moderne, vous le savez : le vinaigre, contre les poux, c’est du flan. Ça ne marche pas, je veux dire. Les ancêtres, le savoir traditionnel, tout ça, c’est bien entendu des conneries. Vous êtes une femme moderne, il vous reste donc…

La deuxième étape : se tourner vers internet. Internet ! Google ! Wikipedia ! Tout le savoir de l’humanité à portée de main ! Les mystères de l’univers révélés, offerts à votre curiosité ! Demandez, on vous répondra. Il est 22h45, vous vous jetez sur votre ordinateur comme on agrippe une bouée de sauvetage. « Google, ô fontaine de savoir, dis-moi comment débarrasser les cheveux de ma fille des poux qui l’infestent ! »

« Écoute-moi, humaine, et fais ce que je t’ordonne par le biais de ce blog criard et mal mis en page : pour te débarrasser des poux, tu dois enduire la tête de ta fille de mayonnaise, recouvrir le tout de film plastique alimentaire, laisser reposer pendant 2 heures puis lui laver les cheveux au shampooing. J’ai dit, humaine. Va en paix. »

Non mais les conneries qu’on trouve sur internet, quand même ! De la mayonnaise ! N’importe quoi, vraiment. C’est bien aussi idiot que le vinaigre, tiens. En même temps, là, il est 23h15, et il va bien falloir faire quelque chose. Faire quelque chose, oui, mais faire n’importe quoi… De la mayonnaise ! Sur la tête ! Mais ma grand-mère mettait bien du vinaigre. C’est pas plus bête, finalement. Et puis elle ne peut pas aller à l’école comme ça. Et puis c’est surement bon pour les cheveux. Toute cette huile. C’est vrai, ça, c’est surement bon pour les cheveux. Mais d’abord, est-ce que j’en ai, de la mayonnaise. Oui, j’en ai acheté un pot familial pour les frites. Je pourrais faire ça, après tout. Et puis il faut bien faire quelque chose. Et puis il est 23h30. Bon allez.

Vous le faites. Votre fille est grotesque pendant deux heures. Et vous lui lavez les cheveux et là, miracle : les poux et les lentes morts étouffés dans la mayonnaise partent dans la baignoire avec l’eau et le shampooing. Tous.

La mayonnaise est efficace contre les poux.

C’est pas fou, ça ? Hein ? Hein ? C’est pas fou ?

En plus, mourir étouffé dans de la mayonnaise… quand j’y pense… je sais pas… je me dis que c’est comme ça que j’aimerais mourir.

3 commentaires:

  1. Mourir dans de la mayonnaise en pot, ça va pas, non ! Plutôt crever !

    Une vieille bique

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  2. C'est vrai, c'est vrai, je suis d'accord, seule la mayonnaise maison est respectable, mais bon... mieux vaut mourir dans de la mayonnaise industrielle que sans mayonnaise du tout.

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  3. Quoique. J'ai connu une mayonnaise maison faite par la mère folle d'un ami... Et bien, croyez moi ou pas, mais le jour ou j'ai gouté cette mayonnaise là, j'en suis presque venu à trouver des vertus à la mayonnaise industrielle. Comme quoi, il suffit parfois de peu de chose pour que la vie bascule.

    D'ailleurs, j'avais un ami, pendant la guerre, qui avait été blessé. Mais ce n'était pas sa faute.

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